Ulysse
(sur un poème de Joachim du Bellay)
Heureux qui, comme Ulysse,
a fait un beau voyage,
Ou comme cestuy-là qui conquit la
toison, Et puis est retourné, plein d'usage et raison,
Vivre
entre ses parents le reste de son âge !
Quand
reverrai-je, hélas, de mon petit village,
Fumer la cheminée
et en quelle saison
Mais quand reverrai-je, de mon petit
village, fumer la cheminée et en quelle saison,
Mais quand
reverrai-je ?
Reverrai-je le clos de ma pauvre maison
Qui
m'est une province, et beaucoup davantage ?
Plus me plaît le
séjour qu'ont bâti mes aïeux,
Que des palais
Romains le front audacieux,
Plus que le marbre dur me plaît
l'ardoise fine,
Plus mon Loir Gaulois, que le Tibre
latin,
Plus mon petit Liré, que le mont Palatin, Et plus
que l'air marin la douceur angevine.
Mais quand reverrai-je,
de mon petit village, fumer la cheminée et en quelle
saison,
Mais quand reverrai-je ?
J'ai traversé les
mers à la force de mes bras,
Seul contre les Dieux, perdu
dans les marais
Retranché dans une cale, et mes vieux
tympans percés,
Pour ne plus jamais entendre les sirènes
et leurs voix.
Nos vies sont une guerre où il ne tient
qu'à nous
De nous soucier de nos sorts, de trouver le bon
choix,
De nous méfier de nos pas, et de toute cette eau qui
dort,
Qui pollue nos chemins, soit disant pavés d'or.
Mais
quand reverrai-je, de mon petit village, fumer la cheminée et
en quelle saison, mais quand reverrai-je ?
Mais quand
reverrai-je ?
Mais quand reverrai-je ?
Mais quand reverrai-je
?
Mais quand reverrai-je ?